Critique She-Hulk : en vert et contre tous sur Disney+ !
She-Hulk est-elle la comédie drôle et délurée annoncée ? Verdict après quatre épisodes de la nouvelle série Marvel.
Alors que Marvel s’en tient à sa fiche de route sur le grand écran, la franchise se permet quelques écarts dans la petite lucarne. Nouvelles inspirations, nouveaux formats et surtout nouveaux personnages, la Maison des Idées ne se refuse plus rien.
Après le teen-movie avec Miss Marvel, les sitcoms avec Wandavision, les studios explorent cette fois-ci l’univers des séries judiciaires avec She-Hulk. Production super-héroïque oblige, elle a néanmoins quelques spécificités. La série She-Hulk nous a-t-elle fait voir le vert à moitié vide ? Critique.
Jennifer Walters est une avocate en apparence normale. Mis à part un lien de parenté avec l’un des super-héros les plus connus de la planète, cette jeune avocate mène une existence tout à fait ordinaire. Elle navigue entre sa vie de célibataire et ses responsabilités professionnelles. Un équilibre qui va être mis à rude épreuve lorsqu’elle reçoit accidentellement quelques gouttes du sang de Bruce Banner.
Rapidement, cela ne fait aucun doute, elle a la capacité de se transformer en un immense monstre vert et incontrôlable. Incontrôlable ? Pas vraiment puisque contrairement à son cousin, elle semble avoir la totale possession de ses moyens. Sa vie ne sera pas un long fleuve tranquille pour autant. Après avoir perdu son emploi, elle se voit confier une équipe d’avocats spécialisés dans le droit des super-héros. À travers ces différentes affaires, Jennifer Walters va apprendre à composer avec cette nouvelle identité et les responsabilités qui en découlent.
Disons le tout de suite, la série s’inspire de nombreuses productions emblématiques du genre. De New York Police Judiciaire à Suits, en passant par Drop Dead Diva, la production de Jessica Gao ne fait pas figure de nouveauté. Pourtant, chez Marvel, au sein d’un univers très balisé, elle a au moins le mérite d’explorer de nouveaux terrains.
On passera brièvement sur le volet judiciaire de Daredevil, la série développée par Netflix ne faisant pas officiellement partie du Marvel Cinematic Universe. Si Matt Murdock a fait une apparition dans Spider-Man : No Way Home, c’est bien la première fois que la franchise explore ces sentiers au sein de sa licence propre.
Flagrant délit de fan service
Cela ne vous aura pas échappé, Marvel met un point d’honneur à relier ses productions les unes aux autres. Rares sont les films et séries à évoluer tout à fait librement. Récemment, on peut citer Moon Knight qui n’avait jamais fait référence à une autre production du MCU.
Pour She-Hulk, c’est tout l’inverse. La série mise sur son lien étroit avec les Avengers pour attirer les curieux. Les références, guests et autres easter eggs sont nombreux, la série ne cache pas ses intentions. Par le biais de plusieurs face caméra, la série s’amuse à sans cesse briser le quatrième mur et à faire référence à ce fan service qui vaut aux studios de nombreuses critiques.
D’ailleurs, c’est essentiellement avec ce mot que l’on pourrait résumer le chaotique premier épisode. Cette entrée en matière grossière coche toutes les cases du genre, et ne parvient jamais à trouver le bon tempo. Elle élude beaucoup, s’attarde parfois trop, et souffre d’un véritable problème de rythme.
She-Hulk apparaît alors comme un joyeux bordel, qui peine à nous convaincre. La série cherche à en faire beaucoup trop, un peu comme un enfant qui n’arrive pas à se canaliser. Les références aux films et séries du MCU fusent mais la narration oublie de construire une véritable origin story.
La présence d’Hulk alias Bruce Banner n’arrange rien, il rejoue la scène du mentor que l’on a vu des centaines de fois. Heureusement, le second épisode fait office d’argumentaire pour ce que sera la série à l’avenir.
Qui veut rendre justice au genre
Depuis l’émergence des plateformes SVOD, les séries sont moins de véritables productions sérielles que des films morcelés. Netflix est d’ailleurs passé maître dans le genre, procédant ainsi pour l’ensemble de ses contenus ou presque. Sur Disney+, les séries dans le sens très académique du terme sont moins minoritaires.
Wandavision avait par exemple voulu rendre hommage aux sitcoms en adoptant leur narration. Même stratégie pour The Mandalorian, dont la construction épisodique était le principal argument.
She-Hulk reprend cette formule en explorant plusieurs affaires juridiques à chaque épisode, du moins dans les quatre chapitres que l’on a pu visionner. Il faut dire que les volets à explorer sont nombreux, l’arrivée des super-héros devient un véritable casse-tête pour les représentants de la loi et les institutions.
C’est d’ailleurs là que la série trouve sa force. Si on regrette la manière dont la narration survole certains enjeux, force est d’admettre qu’on prend plutôt du plaisir à voir Jennifer Walters s’emparer de ces cas. Moins cérémoniale que Daredevil, la série mêle comédie et bataille juridique avec une certaine décontraction. Si on pouvait redouter ce mélange des genres, la série parvient finalement à distiller ses inspirations avec parcimonie. On esquisse quelques sourires, on rit franchement à certains moments, et la performance de Tatiana Maslany n’y est pas pour rien.
L’actrice, qui avait déjà fait ses preuves dans la série Orphan Black, reproduit l’exploit. Avec un indéniable capital sympathie, elle parvient à convaincre les spectateurs… enfin les jurés. Reste que le tout manque parfois d’un peu de subtilité, notamment dans son approche féministe. La série appuie sa plaidoirie avec de longues tirades militantes. Le message a au moins le mérite de passer. Et puis au détour d’un rendez-vous raté, She-Hulk semble enfin avoir trouvé son tempo. La série s’amuse à détourner les clichés des comédies romantiques, pour donner du corps à son personnage principal et les problématiques qu’elle doit affronter.
Crime contre le bon goût
Les premières images partagées par Disney+ étaient loin d’être engageantes. Alors que la maison des idées est au cœur d’une polémique quant à ses effets visuels, le rendu de la série confirme qu’à vouloir en faire trop… on finit par se perdre dans un océan de mauvais goût.
Récemment, de nombreux artistes VFX ont partagé les difficultés qu’ils rencontraient alors qu’ils travaillaient sur les différents projets de Marvel. Délais irréalistes, retour en arrière et petites économies, ils dénoncent la stratégie des studios. Il faut dire qu’au cinéma et sur Disney+, ils ne chôment pas.
Mais pour pouvoir tenir ce calendrier, la firme de Kevin Feige doit faire quelques concessions. Visiblement, c’est le réalisme des effets visuels qui trinque. Si quelques améliorations, par rapport aux premières bandes-annonces, sont au programme, on est quand même très loin d’un rendu satisfaisant. La texture, ou plutôt l’absence de texture, la lumière, tout dans cette série rappelle les mauvaises heures de la télévision.
Il en va de même pour le choix très controversé de la silhouette de She-Hulk. Si elle est bien moins sexualisée que dans certains comics, elle manque cruellement d’envergure. On aurait aimé la voir se réinventer tout à fait, pour vraiment servir la narration. Pourquoi diable a-t-elle un brushing à la Farrah Fawcett à chaque transformation ?
Du reste, la série explore les codes visuels du genre sans jamais vraiment se démarquer. On notera que s’ils sont plutôt déroutants au début, les regards caméra et autres interactions avec le public sont finalement ce qui permet à la série de se trouver un semblant d’identité.
On passera brièvement sur les scènes d’affrontements cartoonesques du premier épisode, qui participent à faire de She-Hulk une série de brick et de broc. On espère que la série rendra hommage aux personnages qui doivent bientôt faire leur entrée, à commencer par Daredevil. On ne saurait pardonner un écart quant au personnage adoré des fans Marvel.